Flash juridique : Réussir la fin négociée du contrat de travail

Publié le 25 septembre 2023

La rupture conventionnelle offre la possibilité à l’employeur et au salarié de convenir des conditions de la rupture du contrat de travail (Art. L. 1237-11 c. trav.).

Basée sur l’autonomie de la volonté, celle-ci, ne peut être imposée par l’une des parties (Art L 1237-11 c. trav.)

Les étapes en sont fixées par l’article L 1237-11 et s. CT :

1/Les parties conviennent du principe de la rupture lors d’un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister, de même pour l’employeur (art. L. 1237-12 c. trav.)

Lors de ces négociations, aucune contrainte ou pression ne doit être exercée en vue de recueillir le consentement d’une des deux parties (Cass. soc. 23 mai 2013 : n° 12-13865).

2/ L’établissement et la signature de la convention par l’employeur et le salarié traduisent leur libre consentement. (Art L. 1237-11 c. trav.);

3/L’homologation par la DREETS. La partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative, à l’issue du délai de rétractation (Art L.1237-14 c. trav.)

La rupture conventionnelle collective doit faire l’objet d’un accord collectif au sein de l’entreprise, déterminant (art L. 1237-19-1 CT)

Par ailleurs, différentes causes de nullité peuvent entacher la rupture conventionnelle:

Le recours à un médiateur ou un Conseil juridique est de nature à conduire, équitablement, la négociation raisonnée, en conciliant les intérêts:

En somme, le dialogue, l’équilibre contractuel et la bonne foi sont les gages de son succès.

Rupture conventionnelle : négociation et points de vigilance

Mode amiable mettant fin à la relation de travail, la rupture conventionnelle repose sur la volonté et le consentement réciproque des parties.

Cette sortie apaisée des engagements contractuels, a priori simplifiée, il en reste pas moins qu’elle est régie par un cadre légal et un formalisme strict, enrichis par la Jurisprudence.

Dès lors, fruit de la négociation entre les parties, salarié et employeur doivent veiller aux règles tenant tant à la procédure qu’au fond.

Au-delà de sa souplesse, nombre d’accords doivent être rigoureusement fixés à l’effet d’assurer à la convention de rupture son plein effet, assorti d’une sécurité juridique renforcée des droits du salarié.

Décision commune des parties, salarié et employeur, la rupture conventionnelle du contrat de travail résulte du consentement exempt de tout vice, acté par une convention homologuée par l’autorité administrative.

L’article L1237-11 Code du travail la définit en ces termes :

« L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.

La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.

Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties ».

De telle sorte que, différente d’une rupture unilatérale – démission, prise d’acte de la rupture ou licenciement, ni le salarié encore moins l’employeur ne sont fondés à l’imposer.

Néanmoins, elle peut constituer une issue à la relation de travail en cas d’inaptitude du salarié : « Sauf cas de fraude ou de vice du consentement, une convention de rupture peut être valablement conclue par un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident du travail ».

La relation contractuelle concernée par la rupture conventionnelle

Exclusivement appliquée au contrat de droit commun (contrat à durée indéterminée), la rupture conventionnelle n’a pas vocation à s’appliquer aux contrats dérogatoires (contrat à durée déterminée, contrat d’apprentissage….).

Bien qu’exceptionnelle, celle-ci peut, toutefois, valablement s’appliquer aux salariés protégés. Cas prévu par les dispositions des articles L2411-1 et L2411-2 Code du travail. Ici, la rupture conventionnelle – par dérogation à la procédure de droit commun assujettie à l’homologation de la convention par l’administration, est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail.

Toujours est-il que, sous conditions, est tout aussi admise la rupture conventionnelle établie durant la suspension du contrat de travail. Idem pour la cause économique dès lors que celle-ci n’est pas conclue pour contourner les règles du licenciement pour motif économique.

Tel est notamment le cas lorsqu’une rupture conventionnelle concerne un nombre important de salariés ou si elle a pour effet de priver ces salariés du bénéfice des garanties attachées aux licenciements collectifs.

En cela, pour le Ministère du travail, en tout état de cause, la procédure de rupture conventionnelle : « Ne peut être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif et donc de priver, de ce fait, les salariés des garanties attachées aux accords de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences et des plans de sauvegarde de l’emploi ».

La procédure de rupture conventionnelle

Fixées par les dispositions des articles Article L.1237-12 et suivants Code du travail, 3 phases sont nécessaires à son élaboration.

D’abord, l’entretien préalable à la rupture conventionnelle. Les parties au contrat conviennent du principe d’une rupture conventionnelle au cours d’un ou de plusieurs entretiens préalables.

D’ailleurs, elles peuvent se faire assister lors de cet ou ces entretien(s), conformément à l’article Article L.1237-12 dudit Code :

« Les parties au contrat conviennent du principe d’une rupture conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister :

1° Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre d’une institution représentative du personnel ou tout autre salarié ;

2° Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.

Lors du ou des entretiens, l’employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait lui-même usage… ».

A ce titre, les juges du fond sont particulièrement vigilants quant aux conditions des pourparlers et l’expression d’un consentement éclairé, libre et non équivoque, notamment le dol et la violence.

Ainsi, la charge de la preuve incombe à celui qui prétend du vice du consentement :

“Pour que la nullité pour dol d’une rupture conventionnelle soit admise, il incombe à l’employeur de faire la démonstration que les manœuvres du salarié ont été déterminantes de son consentement.

Aussi est-elle viciée le consentement du salarié intervenu à la suite d’un harcèlement :

« Le salarié, n’ayant pas eu d’autre choix que d’accepter la rupture conventionnelle pour échapper au harcèlement, n’avait pas, ce faisant, donné un consentement libre et éclairé.

La violence morale et le harcèlement constituent un vice de consentement ».

En cela, il est utile de rappeler que le dol est une cause de nullité lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Sur ce point, il est de jurisprudence constante qu’il appartient à celui qui invoque un vice du consentement d’en rapporter la preuve.

Ensuite, une convention de rupture conventionnelle doit être formalisée, assortie d’un droit de rétractation.

En ce sens, il résulte des dispositions de l’article L1237-13 du Code travail que « la convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L1234-9 ».

De même, ladite convention fixe la date de rupture envisagée. Laquelle est établie en double exemplaire sur un formulaire spécifique et transmis en télédéclaration. A noter qu’un autre formulaire spécifique est requis pour les salariés protégés dont la rupture conventionnelle nécessite une autorisation de l’inspecteur du travail.

Protection supplémentaire, ce droit de rétractation est, en effet, une exigence substantiellereconnue et encadrée par l’article précité : « A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie ».

En cela, l’exercice ce de droit à la renonciation s’entend comme volonté expresse, prouvée par un écrit.

Enfin, l’homologation administrative de la rupture conventionnelle entérine la fin de la relation de travail. À l’issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse à la DREETS compétente une demande d’homologation. Depuis le 1er avril 2022, cette demande se fait obligatoirement via le téléservice TéléRC. Du point de vue de la compétence territoriale, l’administration compétente est celle du lieu où est établi l’employeur.

Partant, un délai d’instruction de 15 jours ouvrables est ouvert à l’inspection du travail, à compter du lendemain du jour de la réception de la demande. En clair, avant l’écoulement de ce délai, la convention ne produit aucun effet : « Un délai d’instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s’assurer du respect des conditions prévues à la présente section et de la liberté de consentement des parties ».

Dès lors, à défaut de notification dans ce délai de 15 jours ouvrables, l’homologation est réputée acquise et l’autorité administrative est dessaisie. En tous cas, la validité de la convention est subordonnée à son homologation.

Ainsi, il a été jugé que la fraude commise par l’employeur a pour effet le report du délai de prescription de la contestation de la rupture : « La fraude de l’employeur, qui a recouru à une rupture conventionnelle afin de se soustraire à la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi, ne permet pas d’écarter le délai de prescription d’un an prévu par l’art. L1237-14 car elle n’a pas été commise dans le but d’épuiser ce délai ; elle a toutefois pour effet de reporter le point de départ de la prescription au jour où le salarié en a eu connaissance ».

De même, la non remise d’un exemplaire de la convention entraîne la nullité de celle-ci, outre sa requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse : « La remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire pour engager la procédure d’homologation, mais également pour garantir le libre consentement du salarié en lui permettant d’exercer son droit de rétractation prévu par l’art. L1237-13 ; il s’agit d’une formalité substantielle puisque, dès lors qu’il est établi que le salarié n’avait pas reçu un exemplaire de la convention de rupture, cette dernière est atteinte de nullité, et la rupture doit alors s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ».

Dans le même ordre d’idées, doit être annulée la convention qui ne comporte pas la signature de l’employeur sur l’exemplaire remis au salarié, peu important que l’employeur ait toujours la possibilité d’exercer son droit de rétractation, dans le délai de 15 jours imparti, à compter de sa propre signature de ce document qui rappelle expressément l’existence de cette faculté.

Les indemnités consécutives à la rupture conventionnelle

Conformément aux disposition des articles L1234-19 et L1234-20, et R1234-9 Code du travail, l’employeur doit remettre au salarié un certificat de travail et un exemplaire de l’attestation Pôle emploi, outre un solde de tout compte et verser une indemnité de rupture : « L’employeur délivre au salarié, au moment de l’expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d’exercer ses droits aux prestations mentionnées à l’article L5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi ».

La négociation de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle

Conformément aux disposition des articles L1234-19 et L1234-20, et R1234-9 Code du travail, l’employeur doit remettre au salarié un certificat de travail et un exemplaire de l’attestation Pôle emploi, outre un solde de tout compte et verser une indemnité de rupture : « L’employeur délivre au salarié, au moment de l’expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d’exercer ses droits aux prestations mentionnées à l’article L5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi ».

La négociation de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle.

En application de l’article L1237-13 du même Code: « La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L1234-9 ».

En d’autre termes, le salarié bénéficie d’une indemnité dite “spécifique” de rupture conventionnelle dont le montant ne peut, en tous cas, être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement (exigible au cas où le salarié est titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur, qui a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

En ce sens, le montant de l’indemnité doit être calculé et consenti avec rigueur, puisque : « Le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle ne peut être inférieur au montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement dès lors que celle-ci est plus favorable que l’indemnité légale, peu important qu’elle soit limitée à certains cas de licenciement ».

Ici, les erreurs entachant la convention de rupture n’ont pas nécessairement pour effet sa nullité : « Si les parties ont stipulé un montant d’indemnité inférieur à celui prévu par le Code du travail, et ont fixé une date de rupture erronée, la nullité de la convention de rupture n’est pas encourue pour autant ; il appartient au juge de rectifier la date de la rupture et de procéder à une condamnation pécuniaire ».

Pour ce concerne le calcul de cette indemnité, le site du ministère du travail TéléRCi propose un simulateur de calcul du montant de l’indemnité de rupture conventionnelle.

Au titre des droits inhérents à la rupture conventionnelle, le salarié bénéficie des allocations d’assurance chômage dans les conditions de droit commun.

S’agissant de la renonciation à la clause de non concurrence, celle-ci doit intervenir au plus tard à la date de rupture fixée par la convention : « En matière de rupture conventionnelle, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires ».

En l’espèce, la chambre sociale fait droit aux demandes du salarié – indemnité compensatrice de congés payés – sur le fondement des articles L3141-1, L3141-22 et L3141-26 Code du travail, en ce sens que « la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaires, elle ouvre droit à congés payés ».

Par ailleurs, sur le plus contentieux, les recours en contestation de la validité de la convention conventionnelle sont enfermés dans un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention. Motifs : un vice de forme, méconnaissance d’un droit substantiel, vice de consentement : dol, erreur, violence, au sens de l’article 1130 Code civil.

Enfin, de par l’issue doublement gagnante pour les parties, le règlement amiable des litiges afférents peuvent être anticipés et résolus au travers, notamment, la médiation. Outil de la QVCT, la médiation apparaît être un mécanisme au service des ressources humaines – de surcroit moins coûteux, rapide, basé la co-contribution des partie et la rationalité, au titre de l’obligation de résultat de l’employeur.

Pour le médiateur, l’objectif étant de déterminer les attentes, identifier les intérêts de chacun partie, à l’effet de rétablir le lien communicationnel ; apaiser esprits ; agir sur les sources des tensions.

A cet titre, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ainsi que la loi du 22 décembre 2021 ont, du reste, introduit et renforcé, à titre expérimental la médiation préalable obligatoire dans la fonction publique territoriale. En outre, le décret du 28 août 2019 a institué le recours à la médiation pour les personnels des établissements publics de santé lors des différends avec la hiérarchie et entre des membres du personnel.

En matière de harcèlement, l’article L1152-6 Code de travail renvoie également à la médiation.

En somme, la médiation, outil de dialogue et de prévention, intégrée dans une démarche managériale globale, s’ajoutant à des mécanismes existants notamment, QVCT, formation, dialogue inclusif, management bienveillant, favorise le dialogue social et désamorce les conflits.

C’est là aussi un levier d’issues apaisées aux litiges pour l’avocat.

En définitive, la commune volonté des parties à la relation de travail de mettre fin au contrat s’accompagne de garde-fous et de protections essentielles, garantissant le libre consentement et les droits fondamentaux du salarié. Sa négociation et sa validité reposent sur la bonne foi, la loyauté et l’équilibre contractuel.